Les plantes dépolluantes sont-elles vraiment efficaces ?
Les plantes d’intérieur trônent fièrement sur nos étagères, nos rebords de fenêtres et parfois même dans nos salles de bains et on leur prête des vertus dépolluantes. Mais que dit vraiment la science ? Quelles sont les idées reçues à déconstruire ? On fait le tri entre le vrai et le faux. On démêle le vrai du faux.

Elles ont ce petit truc qui permet en un instant d’embellir une pièce. Depuis longtemps, les plantes ont pris possession de nos intérieurs, sur les tables, les étagères... Elles s’invitent dans nos salles de bain pour leur soi-disant capacité à absorber l’humidité. Elles n’étaient qu’esthétiques, elles seraient désormais dépolluantes. Une affirmation qui n’est ni tout à fait juste, ni tout à fait fausse. On fait le point sur les idées reçues autour des plantes et ce qu’en dit la littérature scientifique.
« Les plantes d’intérieur purifient l’air de nos maisons » — FAUX (ou presque)
L’idée vient d’une étude menée en 1989 par la Nasa (Nasa Clean Air Study), dans le cadre d’un programme de recherche sur les systèmes de vie en circuit fermé dans les stations spatiales. Elle y testait la capacité de certaines plantes à absorber des Composés organiques volatils (COV) comme le benzène, le formaldéhyde ou le trichloréthylène. Résultat : oui, certaines espèces tel que le spathiphyllum (ou fleur de lune), le lierre anglais, le palmier bambou ou encore la fougère de Boston sont capables d’absorber des polluants via leurs feuilles et leurs racines.
Offrez un abonnement à Paysans de la Loire
Mais attention : ces tests ont été réalisés en laboratoire, dans des chambres hermétiques et sur de très petites surfaces. Des conditions très éloignées de celles d’un logement classique. En 2019, une étude publiée dans le Journal of Exposure Science & Environmental Epidemiology par Bryan Cummings et Michael Waring, deux chercheurs de l’université de Drexel (États-Unis), a montré qu’il faudrait environ 10 à 1 000 plantes par mètre carré pour obtenir un effet significatif. Même conclusion dans une publication de juillet 2014 d’Atmospheric Environment : aucun effet mesurable en conditions réelles, dans une pièce correctement ventilée.
« Certaines plantes absorbent des polluants spécifiques » — VRAI, mais pas dans les proportions espérées
Chaque plante n’agit pas sur les mêmes polluants. Le spathiphyllum (fleur de lune) aurait une action sur le formaldéhyde, le chlorophytum sur le monoxyde de carbone, l’aloe vera sur le benzène. Mais dans des volumes d’air aussi importants qu’un salon ou une chambre, et avec le renouvellement d’air naturel, l’effet filtrant devient très marginal.
Certaines technologies hybrides, comme les filtres bio-inspirés associant plantes et substrats filtrants, permettent une meilleure efficacité. Mais ces dispositifs, complexes et coûteux, n’ont rien à voir avec le pot de fleur classique.
« Plus j’ai de plantes, plus mon air est pur » — FAUX
Accumuler les plantes ne rend pas l’air plus propre. Pire : une plante mal entretenue peut dégager des moisissures, libérer du pollen ou attirer des insectes. Certaines, comme le ficus, libèrent même naturellement des COV. L’Ademe (Agence de la transition écologique) recommande donc de ne pas multiplier les plantes sans discernement, et de préférer des variétés peu allergènes, en fonction des occupants du logement (enfants, animaux, personnes sensibles).
« Les plantes sont une solution naturelle, donc forcément bonne pour la santé » — FAUX
Naturel ne rime pas toujours avec inoffensif. Le dieffenbachia (cannes des muets) ou le pothos, par exemple, sont toxiques en cas d’ingestion. D’autres peuvent irriter la peau ou les muqueuses. Si vous avez un chat, un enfant en bas âge ou des antécédents allergiques, mieux vaut bien vous renseigner avant de végétaliser votre intérieur.
Lire aussi : Le portrait : Marie Simon, infatigable centenaire
« Aérer régulièrement est plus efficace que les plantes » — VRAI
Aérer au moins dix minutes par jour est le geste le plus simple et le plus efficace pour réduire la concentration des polluants. C’est essentiel, notamment en hiver, quand nos logements sont très peu ventilés. Complétez cela par un bon entretien de la VMC, et vous avez là une solution bien plus performante que n’importe quelle plante.
« Les plantes ont quand même des effets bénéfiques » — VRAI
Si leur effet dépolluant est contestable, leur impact psychologique est avéré. Elles apaisent, réduisent le stress, embellissent l’espace et créent une ambiance plus chaleureuse. Des études menées en entreprise ou dans des environnements médicaux ont montré que la présence de plantes favorisait la concentration et le bien-être.
Ce qu’il faut retenir
Les plantes dites « dépolluantes » ne sont pas des gadgets, mais elles ne remplacent ni l’aération ni la prévention des sources polluantes. Elles ont leur place dans un intérieur sain, à condition de ne pas les surévaluer. Le trio gagnant : ventiler, choisir des matériaux sains, et entretenir ses plantes avec soin.
6 conseils pour (vraiment) dépolluer sa maison
Selon l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI), l’air intérieur peut être cinq à dix fois plus pollué que l’air extérieur. L’étude souligne aussi que nous y passons 60 à 90 % de notre temps. Un problème de santé publique encore trop sous-estimé selon l’étude exploratoire du coût socio-économique des polluants de l’air intérieur publié en 2014. Ici, les chercheurs mettent en avant que cette pollution serait de 19,526 milliards d’euros : « L’essentiel du coût socio-économique tient à la mortalité et à la baisse de la qualité de la vie des personnes victimes d’une pathologie. L’économie de dépenses publiques de 209 millions d’euros de retraites non versées ne compense pas les dépenses de soins. Les finances publiques sont donc détériorées », précise l’étude. Voici quelques conseils pour prendre soin de sa maison.
1. Aérez, même en hiver. Et surtout en hiver.
Le conseil peut sembler banal, mais il reste le plus efficace. Aérer dix minutes par jour, matin et soir, permet de renouveler l’air et d’évacuer les polluants accumulés. Et pas seulement quand on cuisine ou qu’on fait le ménage : c’est un réflexe quotidien. Même en plein mois de janvier. L’Ademe recommande d’ouvrir les fenêtres en grand, plutôt que de les entrebâiller longtemps, pour créer un courant d’air et maximiser le renouvellement. Coupez le chauffage pendant l’aération pour éviter les pertes d’énergie.
2. Vérifiez (et entretenez) votre ventilation
Ventilation naturelle ou mécanique, elle est essentielle. Dans les logements récents, elle passe souvent par une VMC (Ventilation mécanique contrôlée), dont les bouches doivent être dépoussiérées tous les trois mois et révisées chaque année. Dans les habitats anciens, la ventilation peut être passive : il est alors crucial de ne pas obstruer les grilles d’aération, même si elles laissent passer un peu de froid. Une VMC encrassée ou absente, c’est un air vicié qui stagne, et des moisissures qui prolifèrent.
3. Ménage écolo : gare aux faux amis
Vous utilisez des produits « naturels » au citron ou à l’eucalyptus ? Prudence : les huiles essentielles, même bio, émettent des Composés organiques volatils (COV). Les sprays désodorisants, bougies parfumées et autres diffuseurs contribuent à dégrader l’air, pas à l’assainir. L’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) recommande d’éviter les produits parfumés, même quand ils affichent un label « vert ». Préférez le vinaigre blanc, le savon noir et le bicarbonate. Oubliez l’encens, le papier d’Arménie et les sprays multi-usages parfumés.
4. Aménagez malin : attention aux meubles neufs
Le mobilier aggloméré (panneaux de particules, contreplaqué) est souvent traité avec des colles à base de formaldéhyde, un COV classé cancérigène. Même chose pour les matelas en mousse, les rideaux synthétiques ou les tapis traités antitaches. Pour limiter leur impact, déballez-les dans un garage ou une pièce bien ventilée. Aérez intensément pendant plusieurs jours après achat. Privilégiez les meubles en bois massif, non traités, avec des finitions à l’huile naturelle ou à la cire.
5. Évitez les sources de combustion en intérieur
Bougies, cigarettes, poêles à bois, cuisinières au gaz… Ces sources dégagent monoxyde de carbone, suie, particules fines et COV. Le chauffage au bois, en particulier, est l’une des premières sources de particules fines en France, selon l’Ineris (Institut national de l'environnement industriel et des risques). Un bon tirage, un poêle aux normes, un conduit bien entretenu et une bonne aération sont indispensables pour réduire l’impact de ces systèmes.
6. Entretenez votre logement pour éviter les moisissures
L’humidité favorise le développement de moisissures, qui relâchent dans l’air des spores irritants pour les voies respiratoires. Surveillez les signes visibles : taches noires, odeur de moisi, condensation sur les vitres. Pour prévenir leur apparition, maintenez une hygrométrie entre 40 et 60 % (utilisez un hygromètre si besoin). Réparez rapidement les fuites. Ne laissez pas sécher le linge à l’intérieur sans aération et nettoyez les zones à risque avec du vinaigre blanc.