La rencontre des consommateurs avec les producteurs

A l'heure des premiers bilans lundi, les organisateurs de la Fête du charolais indiquaient que « tous les voyants sont au vert pour l'édition 2017 » (toutes les photos sont à découvrir en cliquant ici). Effectivement, de nombreux critères sont en progression positive, preuve que cet événement annuel prend de l'ampleur. Le nombre d'animaux inscrits avait donné la tendance quelques jours avant : 233 pour le concours d'animaux reproducteurs contre 212 en 2016 et 138 pour le concours d'animaux de boucherie contre 128 en 2016. Elle s'est confirmée avec la fréquentation. Malgré une météo incertaine, les visiteurs se sont rendus en nombre à la Fête du charolais. Les organisateurs les estiment entre 10 000 et 11 000 avec les entrées payantes achetées au guichet, les billets vendus en pré-vente aux entreprises par les organisateurs et les éleveurs (éleveurs charolais 42 et syndicat charolais du Rhône), les nombreuses invitations envoyées et les enfants pour lesquels l'entrée est gratuite jusqu'à 16 ans. Selon Christian Chargueraud, président du comité d'organisation, « la progression est de près de 1 000 entrées ». La bonne fréquentation est confirmée par le nombre de repas servis : 1 891 repas vendus les samedi et dimanche midis en 2017 contre 1 518 en 2016. Avec la soirée du samedi (environ 500 personnes, comme en 2016), au total ce sont près de 2 400 repas qui ont été servis par le traiteur Grisard pendant le week-end.
Ces indicateurs sont de bon augure pour l'avenir de la manifestation, mais aussi pour le dossier de candidature pour la tenue du concours national de la race Charolaise au Scarabée que préparent actuellement les responsables de la Fête du charolais. Le président du Herd book charolais avait d'ailleurs fait lui-même le déplacement samedi pour découvrir les infrastructures, l'organisation, les animations, le déroulement de la manifestation. Pascal Langevin a assuré ne pas s'attendre à une telle infrastructure et a trouvé intéressant l'ouverture de la manifestation au grand public. Christian Chargueraud a profité de la présence des élus du territoire, dimanche matin lors de la visite officielle, pour leur demander leur soutien.
Bilan des concours
Pour le président de la manifestation, la Fête du charolais « est un événement incontournable pour la profession. Pour les exposants, c'est l'aboutissement de nombreux mois de travail » avec la vente des animaux et la promotion de leur élevage. Le concours d’animaux reproducteurs a enregistré plus d’inscriptions cette année que pour les dernières éditions. Ce sont les catégories des mâles de l’année et des veaux d’automne qui ont vu leurs effectifs grossir. « Cela s’explique par la conjoncture, commente Hervé Sivet. Les éleveurs préparent de préférence les animaux à vendre, les mâles, plutôt que les adultes, qui servent plutôt à la promotion de l’élevage ». Le responsable du concours poursuit : « Nous avons eu affaire à un beau millésime, avec des animaux de qualité, bien préparés et présentés, des juges qui ont bien fait leur travail ». Néanmoins, des ajustements sur le déroulement du jugement, le samedi, restent à faire pour optimiser l’espace et le temps. Thierry Minard, éleveur dans le Cher, a jugé les prix spéciaux du concours d’animaux reproducteurs. Il confirmait le ressenti des organisateurs et résumait ainsi l’édition 2017 de la Fête du charolais : « Bon concours, bien organisé, site magnifique ». Il précisait : « Nous avons jugé des animaux de qualité. Les sections étaient régulières. La compétition était relevée ». Quant aux prix spéciaux, « nous avons eu affaire à de bons animaux. Nous n’avons pas attribué de prix à regret. Tous méritaient leur prix : le prix d’honneur des veaux mâles fait partie des animaux d’exception, le prix d’honneur laitonne est magnifique… Les quatre animaux qui représenteront ce concours à la finale nationale à Moulins (prix d’honneur des veaux mâles, des veaux femelles, des vaches et des taureaux) devraient lui faire honneur ». Même si une des raisons de participer à un concours est la promotion de son troupeau, les éleveurs apprécient vendre des reproducteurs. Le nombre de transactions réalisées pendant le week-end est sensiblement le même que l’an passé, avec néanmoins le sentiment de la part des organisateurs et des exposants que les visiteurs professionnels étaient moins nombreux. « C’est le cas pour tous les autres concours de la race Charolaise qui se déroulent en ce moment, assure Hervé Sivet. Cette situation reflète la conjoncture de l’élevage ».
Cette année le concours d’animaux gras a rencontré un vif succès auprès des éleveurs en témoigne le nombre important d’animaux inscrits 138 contre 124 en 2016. Le jugement des sections a débuté samedi matin à huis clos sous le chapiteau et s’est poursuivi à l’extérieur sous l’œil impatient des éleveurs pour l’attribution des prix d’honneur. Bruno Recorbet, responsable de l’organisation de ce concours, notait le nombre élevé de vaches inscrites et ses conséquences : « Il y avait une grande hétérogénéité parmi les vaches, ce qui nous a conduits, en dernière minute le vendredi soir, à créer une section supplémentaire pour les culardes. De plus, certaines vaches n’étaient pas à la hauteur d’un concours. Nous envisageons d’opérer une sélection pour l’année prochaine, en nous rendant dans les élevages en amont du concours. La section pour les culardes sera renouvelée si le nombre de vaches entrant de cette catégorie est suffisant. »
Côté génisses, la grande majorité des animaux présentait un niveau satisfaisant. « Les meilleures génisses, ayant obtenu des prix d’honneur, ont largement leur place dans des concours nationaux », soulignait Bruno Recorbet, qui notait également le niveau exceptionnel de la grande championne, de la Scea Beaujeu Daniel et fils, qui a remporté le Grand prix d’honneur de la Ville de Roanne. Concernant les ventes, si la majeure partie des animaux a trouvé acquéreur (seulement quatre génisses n’ont pas été vendues), les cours ont aussi été hétérogènes : « Les animaux supérieurs se sont bien vendus tandis que pour les animaux plus standards, les ventes ont été plus tendues. » A noter, la présence importante des bouchers, qui sont les premiers acheteurs, en nombre d’animaux gras, au concours de Roanne.
Le palmarès de ces deux concours est à découvrir en cliquant ici.
Promotion de la viande
Au fil du temps, d'autres expositions et animations se sont greffées aux concours d'animaux, assurant ainsi la promotion de l'agriculture. Les bouchers du Roannais s'investissent également largement dans la manifestation en se chargeant de la promotion de la viande. Pendant tout le week-end, la viande issue des élevages charolais a été mise à l’honneur. De l’éleveur jusqu’au restaurateur, en passant par les bouchers et différents professionnels du monde de l’élevage et de l’aval, les visiteurs ont eu l’occasion de rencontrer les divers maillons de la filière viande bovine, depuis le jugement des animaux sous les chapiteaux ou au niveau du ring, jusqu’à leur assiette lors des différents repas organisés. L’occasion de découvrir la viande charolaise sous différentes formes et différentes recettes. La Fédération des bouchers de la Loire, présente durant l’évènement pour mieux faire connaître le métier, proposait également aux visiteurs des dégustations et, pour la première fois cette année, une vente de viande locale. Pendant les deux jours, les visiteurs se sont attroupés devant le stand mis en place pour l’occasion ainsi que pour assister au concours des apprentis bouchers, organisé dans le cadre de l’événement. Le public a observé, avec beaucoup d’intérêt et d’attention, le travail de découpe, de préparation et de présentation effectué par ces futurs professionnels. L’ensemble des acteurs de la filière s’est réuni dimanche en fin d’après-midi au niveau du ring à l’intérieur du Scarabée pour la remise des prix, accompagnée de la présentation des animaux de boucherie primés. L’occasion de rappeler les liens forts entre les bouchers et les éleveurs, ainsi que les caractères morphologiques recherchés par les deux professions sur les animaux pour obtenir une viande de qualité.
Jean-Luc Brise, le président de la Fédération des bouchers de la Loire, revenait sur les deux journées écoulées et rappelait qu’elles étaient l’occasion de « redorer le blason de la boucherie ». La vente de viande, grande nouveauté de cette année, a rencontré un vif succès : « Nous avons mis en place une boucherie éphémère dans l’esprit de la boucherie artisanale. Nous sommes satisfaits de ce premier essai. » Dimanche soir, une majeure partie de la viande était en effet vendue. Concernant le concours d’apprentis, il ne manquait pas de remercier les professeurs du CFA de Roanne, dont Pascal Tantot et Eric Chaux, qui se sont impliqués dans l’organisation, ainsi que les membres du jury. Au total, 13 élèves se sont affrontés sur les deux jours. Tous ont été récompensés.
Partenaires et bénévoles
Lors de la remise des prix, dimanche en fin de matinée, le président de la Fête du charolais a redit que sans le soutien logistique et financier des partenaires, rien ne serait possible. Dans ses remerciements, il n'oubliait pas non plus les membres du bureau de l'association Fête du charolais, les éleveurs qui viennent prêter main forte avant et après, ainsi que la centaine de bénévoles qui oeuvre tout le week-end et les élèves du Lycée de Roanne-Chervé. « Chacun apporte sa pierre à l'édifice ». Les responsables de la manifestation ont apprécié la forte mobilisation des éleveurs pour installer les infrastructures les jours précédant le week-end et pour ranger et nettoyer le site le lundi. « Les exposants prennent conscience que les choses ne se font pas toutes seules et que s'ils ne viennent pas aider, la manifestation ne peut pas avoir lieu », assure Christian Chargueraud.
Les représentants de la ville de Roanne, Daniel Perrez, de Roannais agglomération, Marcel Augier, du conseil départemental, Chantal Brosse, ont assuré les responsables de la Fête du charolais de leur soutien, les ont félicités pour l'organisation de l'événement et ont rappelé les actions conduites par leur collectivité en faveur de l'agriculture. Le nouveau vice-président du Conseil régional en charge de l'agriculture, Jean-Pierre Taite, rappelait lui aussi l'intérêt porté par la Région à l'agriculture (budget, versement des aides...).
Des prix justes
Christian Chargueraud estime qu'il faut « rester confiant en l'avenir. Les éleveurs sont prêts à s'adapter aux attentes de la filière, mais il leur faut des prix justes et une répartition équitable de la valeur ». Le préfet de la Loire, Evence Richard, confirmait : « Quand on élève des animaux, ce n'est pas pour le plaisir du geste ou de la génétique, c'est parce que l'on s'insère dans une filière ». Il poursuivait : « A travers les Etats généraux de l'alimentation, le président de la République a esquissé certaines pistes. Nous devons tous les explorer pour avoir des filières qui retrouvent la prospérité économique ». Pour Jean-Claude Tissot, sénateur, les Etats généraux de l'alimentation ne doivent pas se restreindre uniquement à des discours. « Ils doivent réellement servir à l'agriculture ». La députée Nathalie Sarles prenait ensuite la parole : « Si les Etats généraux de l'alimentation ont été lancés dès le mois de juin, c'est bien parce qu'elle constitue une priorité. Chacun doit prendre ses responsabilités. L'Etat prendra sa part en légiférant par ordonnance, pour aller plus vite ».
« Pour que les habitants continuent à se promener dans les paysages que nous connaissons, il faut que les agriculteurs restent, assurait le président de la Chambre d'agriculture, Raymond Vial. Pour cela, ils doivent avoir un revenu décent ». Et un prix rémunérateur pour les producteurs passe « par l'acte d'achat des consommateurs», et notamment local. « Etre citoyen, c'est acheter local pour défendre toutes les productions agricoles ».
Bien évidemment, dans les discours, outre la question du prix rémunérateur pour les agriculteurs, il a été question des calamités, notamment la sécheresse 2017. « Nous avons besoin du soutien des élus, assurait Raymond Vial. Si la Loire n'est pas reconnue au titre des calamités agricoles, elle perdra beaucoup d'agriculteurs ».
Anaïs Labrosse et Lucie Grolleau Frécon